Les poissons
  Respirer en eaux troubles  

Comme tous les êtres vivants, les poissons ont besoin d’oxygène pour vivre. Ils extraient cet oxygène de l’eau par leurs branchies. Mais lorsque l’eau qui les baigne ne contient pas suffisamment de ce précieux, de cet indispensable gaz, que font-ils ? Ils résistent si c’est pour un temps très court, sinon, ils meurent ou ils s’adaptent. Ainsi la nature a-t-elle inventé diverses parades pour que les poissons puissent vivre dans des eaux trop pauvres en oxygène.

L’eau renferme peu d’oxygène dissous et cette faible quantité peut encore décroître sous l’effet brutal de divers facteurs comme l’augmentation de la salinité, le réchauffement de l’eau, l’absence de brassage, une surpopulation accidentelle. Certains poissons, comme la truite, qui préfèrent normalement des eaux bien oxygénées, peuvent faire face momentanément à une certaine hypoxie, ou manque d’oxygène. Le sang s’acidifie alors (il perd ½ unité de pH) en quelques dizaines de secondes du fait des globules rouges qui libèrent des ions H+ dans le plasma en les échangeant contre des ions sodium (Na+). Les globules rouges ainsi modifiés peuvent alors fixer d’avantage d’oxygène qu’ils trouvent au contact de l’eau autour des branchies.

Cependant, pour une vie prolongée dans une eau pauvre en oxygène dissous, la nature a imaginé de nombreux systèmes en complément des branchies.

Un labyrinthe pour piéger l’air

Ainsi, chez les poissons faisant partie de l’ancienne famille des Labyrinthidés (Anabantidés, Belontiidés, Helostomatidés et Osphronémidés), il existe un organe annexe, le labyrinthe, qui leur permet d’utiliser l’air qu’ils viennent prendre à la surface de l’eau. Il faut d’ailleurs noter que si on les empêche de remonter à la surface, ils meurent asphyxiés dans l’eau, leur milieu naturel ! L’air aspiré par la bouche remonte dans le labyrinthe qui est un diverticule de la cavité branchiale situé en haut et en arrière de celle-ci. Dans ces cavités, sises des deux côtés de la tête, se trouvent des plaques osseuses disposées comme les pans d’un labyrinthe. L’épithélium qui les recouvre, richement vascularisé, autorise les échanges d’oxygène et de gaz carbonique entre le sang et l’air. Le labyrinthe permet ainsi aux poissons de survivre dans des eaux très pauvres des rivières et rizières du Sud-est asiatique. Les perches grimpeuses (du genre Anabas) sont capables, grâce à ce labyrinthe, de se déplacer sur terre, entre les plans d’eau, en « rampant » sur leurs nageoires pectorales et leurs os operculaires.

De l’eau plein la bouche

Les périophthalmes, poissons des mangroves par excellence, chassent les insectes en grimpant sur les racines des palétuviers. Ils sont amphibies. Dans l’eau, leur respiration est branchiale. Hors de l’eau, les opercules obturent parfaitement leurs vastes chambres branchiales, gardant ainsi une réserve d’eau importante autour des branchies qui peuvent y prélever l’oxygène. De plus, la respiration devient en partie cutanée car leur peau, très fine et riche en capillaires sanguins, particulièrement au niveau de la queue autorise les échanges gazeux.

De l’air dans les intestins

La loche clown (Botia macracantha) peut ingérer l’air pour utiliser sa muqueuse intestinale pour prélever l’oxygène. La gymnote (ou anguille électrique) a une muqueuse buccale très riche en capillaires sanguins. Elle remonte à la surface pour renouveler l’air dans sa bouche, à ce niveau se font les échanges gazeux. La vessie natatoire (ou gazeuse) peut aussi être utilisée comme organe respiratoire annexe.

Des poumons chez les poissons

Mais de véritables poumons existent chez les poissons, il faut aller les chercher chez les dipneustes. Ce sont deux grands sacs allongés dont le droit, seul, s’ouvre dans l’œsophage par la trachée pourvue d’un sphincter. De la paroi des poumons s’élèvent de multiples cloisons qui délimitent des alvéoles tapissés d’un épithélium mince et riche en capillaires sanguins. Les protoptères africains et le lépidosiren sud-américain ont une respiration essentiellement pulmonaire. Ils sont ainsi capables d’estiver dans la vase, sans eau, durant la saison sèche.


l’aquarium à la maison n°11